Chers frères et sœurs,

 

Le futur grand évêque saint Augustin, peut-être le plus grand des Pères de l’Église latine, juste après sa conversion, alors qu’il était encore catéchumène, s’exclamait :

« Ma voix, mon Dieu, a crié vers toi. En lisant les psaumes de David. Chants fidèles. Airs de dévotion sans emphase. J’étais mal dégrossi à ton amour brut. Catéchumène en vacances… […] C’était ma voix, dans ces psaumes, qui criait vers toi. Ils me faisaient m’enflammer pour toi. Je brûlais de les réciter, à la terre entière si j’avais pu. Devant l’arrogance des hommes. Oui, on les chante sur la terre entière. Rien ne résiste à ta chaleur. » (Confessions, livre IX, 8, trad. Frédéric Boyer.) 

 

Les 150 psaumes de la Bible sont un trésor inépuisable auquel revient sans cesse l’Église. L’office monastique et le bréviaire y puisent largement. Chaque baptisé est invité à se les approprier pour nourrir sa prière personnelle. 

 

Comme le disait Augustin, c’est notre voix, dans ces psaumes, qui crie vers Dieu. C’est la voix du malheureux dans la détresse, c’est la voix de louange dans la victoire, c’est la voix sereine dans la paix. Ce sont des cris, des appels à l’aide, des louanges, et même des appels à la vengeance ou à la destruction des ennemis. Rien de doucereux, plutôt, tant dans la louange que dans l’invective, une vigueur qui pourrait surprendre. C’est la voix du peuple de Dieu, du peuple juif, du peuple des baptisés, des membres du corps du Christ. Et c’est ainsi la voix de l’Église. Mais c’est aussi la voix du Christ lui-même, celui qui est la tête de son corps qu’est l’Église. Jésus a prié avec les psaumes, jusque sur la croix. Le Christ qui s’est fait homme a pris sur lui tous nos cris, les louanges des justes aussi bien que les expressions les plus extrêmes de nos 
désespérances ou de nos agonies. Quand je prie un psaume, je m’adresse au Christ comme le destinataire de ma prière, mais il est aussi celui qui prie par ma bouche, l’auteur de ma prière, le corps tout entier dont je ne suis qu’un membre. 

 

Prier avec les psaumes, prier les psaumes, c’est ainsi rejoindre la voix de toute l’Église, c’est s’unir à tous les fidèles, qu’ils soient dans la joie, la louange, la souffrance ou la persécution. C’est rejoindre la voix même du Christ. Prier les psaumes, c’est progressivement ajuster notre prière personnelle, accueillir nos cris mal dégrossis, nos louanges imparfaites, et leur donner les mots d’une prière plus juste, plus affermie, plus fervente aussi. Les psaumes m’apprennent à prier… 

 

Je crois être bien dans mon rôle en vous invitant, frères et sœurs, à vous ressaisir du livre des Psaumes pour soutenir votre prière personnelle. Vous découvrirez bientôt que votre gorge, vos os, vos mains, vos pieds, votre bouche, votre souffle, mais encore l’eau, la terre, le ciel, le vent, le jour et la nuit, s’y retrouvent tous convoqués. Ils trouvent dans les psaumes leurs propres gémissements ineffables, leurs cris, leurs désirs, leurs voix… Et ils nous unissent les uns et les autres dans l’unique prière du Christ. 

 

Laudes et vêpres sont célébrées chaque jour à l’église, n’hésitez pas à tenter l’expérience de vous joindre à la communauté des frères dominicains pour, avec eux, prier les psaumes.

 

fr. Rémi Chéno, o.p.
Modérateur de la paroisse